Rubrique : Italie

Dans les habitudes alimentaires des pays méditerranéens, le pois chiche tient une place importante. De la Sicile à la Côte d’Azur, la farine de pois chiche sert à la fabrication de galettes fines qui furent longtemps un mets de pauvres. En Ligurie, la version locale s’appelle la farinata di ceci et elle régale désormais toutes les classes sociales.

Si le pois chiche tient une position aussi centrale dans la gastronomie méditerranéenne, c’est parce que cette légumineuse représente une source de protéines peu exigeante en eau. Tels quels ou réduits en farine, les pois chiches représentaient la viande du pauvre dans des régions où ni l’élevage, ni la pêche ne pouvaient subvenir aux besoins protéiques.

Depuis l’Antiquité, on trouve dans ces pays des recettes simples de galettes fines à base de farine de pois chiches. Aujourd’hui, en Italie, les variantes sont nombreuses : panelle siciliennes, cecina toscane, fainé sarde et farinata ligure (la région de Gênes). En France, il y a bien sûr la socca niçoise et la cade varoise.

Comme ses sœurs, la farinata de ceci doit être mangée dès sa sortie du four. En refroidissant, elle perd son croustillant et se révèle pâteuse. À Nice comme à Gênes, il est fréquent de voir se former devant les points de vente des queues d’habitués qui attendent la sortie de la prochaine fournée pour être sûr de manger la farinata lorsqu’elle est la plus savoureuse, mélange de croustillant et de fondant.

Habituellement, la farinata est simplement assaisonnée de poivre, mais elle peut également être saupoudrée de romarin ou additionnée de pesto ou de stracchino (un fromage de la Lombardie). Comme toutes les nourritures de rue, la farinata est bien sûr meilleure lorsqu’elle est mangée avec les doigts, debout ou sur des tables de fortune, servie dans des feuilles de papier épais qui finiront complètement translucides à force de gras… On peut facilement préparer la farinata chez soi. Servie brûlante à l’apéritif, c’est la recette d’un succès assuré.

Farinata de ceci

Pour une farinata de 40 cm de diamètre

  • 900 ml d’eau
  • 300 g de farine de pois chiche
  • un verre d’huile d’olive extra vierge
  • poivre noir moulu gros
  • sel

Dans un bol, mettez la farine et creusez-y une fontaine. Ajoutez l’eau petit à petit en mélangeant bien pour éviter la formation de grumeaux, jusqu’à obtenir une belle pâte lisse comme une pâte à crêpe. Laissez reposer à couvert pendant cinq à dix heures, à température ambiante, en remuant de temps en temps. Si de la mousse se forme à la surface, ôtez-la avec une écumoire.
Faites préchauffer le four à 220°C. Ajoutez le sel et un demi verre d’huile d’olive à la pâte en mélangeant doucement. Prenez un plat à tarte ou à pizza, versez-y le reste d’huile et étalez bien. Versez-y doucement la pâte et placez au four une demi-heure environ, jusqu’à ce que la farinata soit bien dorée. Passez en mode gril jusqu’à ce que le dessus prenne une belle couleur noisette (environ un quart d’heure). Sortez la farinata du four, saupoudrez-la de sel et de poivre, et coupez-la en parts ou en carrés que vous épongerez avec du papier absorbant. Servez immédiatement avec du romarin séché pour ceux qui le souhaitent.

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Rubrique : Desserts & sucreries

« Et si nous traitions nos noisettes comme les Suisses traitent le cacao ? » C’est ce qu’ont dû penser les inventeurs du gianduja, la mythique pâte de noisettes typique du Piémont italien. Aujourd’hui, Turin est la capitale du gianduja et une expédition à sa recherche se transforme rapidement en orgie sucrée…

Gianduja, ça vous dit quelque chose ? Cette pâte onctueuse est préparée à partir de cacao, de sucre et de noisettes piémontaises (idéalement, les Tonda Gentile delle Langhe). Le tout est broyé finement et parfois enrichi de crème ou de beurre de cacao. Mais d’où vient le gianduja (prononcez « djiandouya ») ?

C’est à la fin du XIXe siècle, à Turin, qu’est né le gianduja. Par analogie avec la fabrication du chocolat, les confiseurs ont développé une technique de broyage et d’affinage d’un mélange de noisettes grillées et de sucre, enrichi de beurre de cacao ou de crème pour une plus grande onctuosité. Ensuite est venue l’idée d’y adjoindre du cacao pour une saveur plus corsée.

Le gianduja tire son nom du plus célèbre des masques du carnaval turinois, Gianduja, imaginé par un grand marionnettiste du XVIIIe siècle, Gian Battista Sales, à partir d’un personnage réel du village de Callianetto, Gioan d’la Douja (Jean de la Chope). Aujourd’hui, le gianduja existe comme pâte à tartiner (c’est l’ancêtre aristocratique du Nutella), comme ingrédient pour la pâtisserie, comme parfum pour les gelati (ah, le gianduja de Pozzetto !) ou comme confiserie, les giandujotti, spécialité turinoise.

Si vous passez par Turin, allez faire un tour dans l’un des hauts-lieux de la giandujotterie locale : Baratti & Milano. Fondé en 1858, ce café est situé depuis 1875 dans la très belle Galleria Subalpina. Chez Baratti & Milano, vous pourrez acheter de la pâte de noisettes à tartiner et des giandujotti, mais également prendre un fabuleux chocolat chaud enrichi d’une généreuse cuillerée de gianduja et servi avec de la panna bien dense (de la crème fouettée). Plongez-en une petite cuillerée dans le chocolat chaud et savourez le contraste entre la panna froide et le chocolat chaud au bon goût de noisette…

Ensuite vous pourrez recommencer l’expérience dans le deuxième haut-lieu giandujesque, le Caffè Torino. Puis un apéritif dans le très historique Caffè San Carlo, suivi d’un deuxième apéritif dans le minuscule Mulassano, inventeur présumé des tramezzini, puis une part de Torta Platti (au gianduja, bien sûr) chez Platti… Aaah, Turin, quelle ville !!!

Baratti & Milano – Piazza Castello 27 – Torino – Italie
Caffè Torino – Piazza San Carlo 204 – Torino – Italie
Caffè San Carlo
– Piazza San Carlo 156 – Torino – Italie
Mulassano
– Piazza Castello 15 – Torino – Italie
Platti
– Corso Vittorio Emmanuele II 72 – Torino – Italie

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Rubrique : Légumes, Riz

Au nom de tous ceux qui adorent la saveur amère, rendons hommage au radicchio italien aux feuilles d’un beau rouge vineux marbré de blanc. Amer à souhait, le radicchio (ou trévise) est un ingrédient précieux pour donner vigueur aux risotti, aux pâtes ou à la pizza. Gloire à son Altesse la Reine des Chicorées !

Le radicchio (ou trévise ou chioggia, Cichorium intybus) est une chicorée typique de la région de Venise. Sa belle couleur provient d’une technique de culture particulière, le blanchiment. Nés dans les champs et encore de couleur verte, les petits radicchi sont déterrés à l’automne, débarrassés de leurs feuilles extérieures et serrés verticalement dans des cages en grillage placées à l’obscurité. La partie inférieure de ces cages (où se trouvent les racines mises à nu) baigne en permanence dans une eau courante.

Après quelques semaines, les feuilles au cœur des radicchi prennent leur couleur bordeaux et leurs nervures deviennent blanches. Plus foncé le rouge, plus délicieusement amer le radicchio. Les radicchi sont alors libérés de leur cage, nettoyés de leurs feuilles extérieures, leur racine est coupée en laissant un petit trognon (qui se consomme comme un radis) et ils partent pour le marché.

Il existe plusieurs variétés de radicchio : par exemple, les Rouge de Trévise précoce et tardive, la Bigarrée de Castelfranco, la Rouge de Chioggia ou la Rouge de Vérone. Les deux premières variétés bénéficient d’une IGP (l’AOC européenne). Le radicchio est utilisé en Italie depuis l’Antiquité où il a la réputation de faciliter la digestion et de tonifier l’organisme par son amertume (la saveur amère stimule la sécrétion des sucs digestifs et de la bile).

En cuisine, il existe mille façons d’accommoder la trévise : crue en salade ou garnie en apéritif (comme les feuilles d’endive), sautée en tant qu’accompagnement (de nouveau comme les endives) ou dans comme ingrédient dans un plat ou sur une pizza. Voici une recette de risotto au radicchio.

Risotto des râleurs (Risotto per i malcontenti)

Pour 4 personnes

  • 400 g de riz à risotto (Arborio, Carnaroli, Vialone Nano)
  • 200 g de radicchio de Trévise
  • un demi-verre de parseman râpé
  • un petit oignon finement haché
  • le jus d’un citron et demi et le zeste d’un citron
  • 150 g de beurre dont la moitié coupée en gros dés et congelée à l’avance
  • 2 litres de bouillon de poule ou de veau ou de légumes, bien chaud
  • sel et poivre

Lavez et essorez le radicchio, coupez-le en lanières pas trop fines. Faites revenir l’oignon dans la moitié du beurre non congelée. Lorsque l’oignon est blond, ajoutez le radicchio et faites-le revenir cinq minutes.

Ajoutez le riz, faites-le revenir une minute en remuant sans arrêt puis ajoutez le jus de citron tout en continuant à remuer. Quand le jus est évaporé, ajoutez une louche de bouillon et remuez jusqu’à ce qu’il soit absorbé. Recommencez, une louche de bouillon à la fois, sans cesser de remuer, pendant vingt minutes. À mi-parcours, ajoutez sel, poivre et le zeste. Quand le riz est al dente, retirez du feu, posez les dés de beurre congelé sur le risotto, saupoudrez avec le parmesan et brassez doucement le risotto avec une cuillère en bois (idéalement percée d’un trou au milieu). Dès que le beurre est fondu, couvrez une minute et servez.

Pourquoi ce risotto est-il destiné aux râleurs ? Probablement parce que la mauvaise humeur était considérée comme le symptôme de l’accumulation de bile (« Le misanthrope ou l’atrabilaire amoureux », ça ne vous rappelle rien ?) et que le radicchio stimule la sécrétion de bile dans l’intestin. CQFD.

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Rubrique : Turin

Quand le mouvement Slow Food rencontre le monde des glaces, cela donne Grom, une petite chaîne turinoise qui surfe sur la vague du développement durable et qui commence à se développer à l’étranger. Ingrédients triés sur le volet, concept marketing ultraléché, les glaces Grom sont ce qui se fait de mieux, hors production artisanale.

En mai 2003, dans le centre de Turin, c’était le buzz du moment : un nouveau glacier avait ouvert, proposant de bons produits et rajeunissant le concept. Dans cette ville riche en glaciers historiques (Pepino, l’inventeur de l’esquimau enrobé de chocolat – le « pinguino » italien – et Fiorio, présent depuis le XVIIIe siècle), l’irruption d’une nouvelle star du gelato fit grand bruit. Depuis, plus de trente succursales Grom ont ouvert, en Italie mais également à Tokyo, Malibu, New York et… Paris.

Le concept Grom, c’est une glace faite « à l’ancienne » avec des ingrédients de qualité produits dans des conditions compatibles avec les principes du Slow Food et du développement durable. En 2007, Grom a acheté Mura Mura, une exploitation de huit hectares dans la région d’Asti, pour y planter des variétés anciennes de fruits, cultivés selon les normes de l’agriculture biologique.

Au-delà de ce joli concept marketobobo, que valent les glaces Grom ? Les Doudes, méfiants comme des belettes, sont allés enquêter au péril de leur taux de cholestérol. Côté parfums, rien à redire, nous sommes dans les grands classiques des gelati, déclinés selon la provenance des matières premières : noisettes Tonda Gentile delle Langhe (les Langhe sont une région du Piémont située autour de Barolo), citrons Sfusato Amalfitano (à côté de Naples), pistaches de Bronte (ville qui s’étend au pied de l’Etna), pêches de Leonforte (à côté d’Enna, également en Sicile), etc.

Côté glaces, la qualité est au rendez-vous même si, pour l’une des Doudes, on est un peu trop dans le produit calibré pour le goût général. Texture crémeuse sans être trop grasse, parfums bien dosés, mais on n’est pas dans la production artisanale à la Pozzetto. Peut-être est-ce l’environnement marketing superléché qui influence le jugement. Chez Grom, tout est pensé avec un œil sur le concept : coupes en papier certifié Forest Stewardship Council ; cuillères en Materbi, une sorte de plastique biodégradable produit à partir d’amidon de maïs et d’huiles végétales ; sorbets préparés à l’eau de source Lurisia ; etc.

Si vous passez par Turin, deux autres glaciers, plus artisanaux, valent vraiment le détour : Alberto Marchetti (où l’on peut déguster une délicieuse glace à la farine de maïs grillé, la farina bonna, ou au bonèt, un flan cacao-amaretti typique du Piémont) et notre préféré, Mondello, un microglacier sicilien à la diabolique glace au miel et au safran.

Grom à Paris : 81, rue de Seine – 75006 Paris.
Les quatres Grom turinois.
Pepino – Piazza Carignano, 8 – Torino, Italie.
Fiorio – Via Po, 8 – Torino, Italie.
Alberto Marchetti – Corso Vittorio Emanuele II, 24 bis – Torino, Italie.
Mondello – Piazza Emanuele Filiberto, 8 – Torino, Italie.

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Rubrique : Épices, condiments & herbes, Produits de la mer

Comme tous les Provençaux, les Doudes vénèrent la pâte d’anchois, humble fille du très illustre garum des Romains et sœur des délicieux pissalat niçois et mélets martégaux. Grâce à sa richesse en acides aminés, dont le glutamate, la pâte d’anchois est le secret d’une cuisine savoureuse. N’hésitez pas à en user et à en abuser !

Il y a environ 4.000 ans, les Babyloniens connaissaient déjà les vertus gustatives des poissons salés fermentés. Ils en faisaient un condiment, le siqqu. Les Grecs l’ont probablement adopté et adapté sous le nom de garos, puis les Romains en ont fait leur garum (également appelé liquamen ou, sous sa forme pâteuse, hallex). On retrouve également ce type de condiment en Asie : nuoc nam vietnamien, nam pla thaïlandais, patis philippin, etc.

Le principe de ces condiments est toujours le même : des poissons (anchois, sardine, maquereau, thon, etc.) ou les viscères de ces poissons sont mis à fermenter dans le sel. Sous l’action des enzymes et des micro-organismes présents dans les intestins, le mélange s’autodigère. La pâte obtenue peut être utilisée telle quelle ou continuer à fermenter pour devenir liquide. Le résultat est un condiment riche en acides aminés, dont certains (acide glutamique, acide aspartique, alanine, etc.) ont la propriété d’amplifier les saveurs des plats qui les contiennent (c’est l’effet « umami », également obtenu avec du shōyu ou du parmesan).

En Provence et sur la Côte d’Azur, il subsiste divers descendants du garum : à Nice, le pissalat qui est une pâte faite à partir d’alevins de sardines (joliment appelés « poutine », mais aucun rapport avec le plat québécois) saumurés, fermentés et parfumés aux épices ; à Martigues, les mélets sont des alevins (d’anchois ? de melettes ?) préparés de la même manière et parfumés au fenouil et au poivre. Mais ces produits étant assez difficiles à trouver, la plupart des Provençaux se contentent de pâte d’anchois, moins goûteuse mais plus pratique.

Et que font les Doudes avec la pâte d’anchois ? Le plus souvent, elles font le quichet ! Le quichet, c’est de la pâte d’anchois diluée dans l’huile d’olive. On s’en sert pour faire une tartine ou comme vinaigrette pour une salade. Sur le même principe, diluée dans de l’huile d’olive maintenue chaude, la pâte d’anchois entre, avec l’ail et le lait, dans la préparation de la banha cauda provençale et piémontaise où l’on trempe des légumes crus taillés en bâtonnets.

Il existe mille autres manières d’utiliser la pâte d’anchois pour augmenter les saveurs d’un plat. Essayez le gigot d’agneau tartiné de quichet à l’ail : vous nous en direz des nouvelles ! Les cardons peuvent également se préparer avec de la pâte d’anchois. Mettez-en partout : la pâte d’anchois, c’est l’ingrédient mystérieux qui fera se pâmer vos convives ! Elle est assez difficile à trouver dans le nord de la France. Deux solutions : l’achat en ligne (par exemple, ici) ou bien la fabrication maison à partir d’anchois salés réduits en purée.

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Rubrique : Rome

Pour ceux qui font une escapade à Rome et qui cherchent une épicerie où trouver de bons produits alimentaires italiens, la Drogheria Innocenzi est une excellente adresse. Située dans le quartier du Trastevere, elle fournit également les Romains en ingrédients exotiques.

Les vieilles épiceries marinées dans leur jus se font rares dans la capitale italienne. Vous savez, celles qui donnent l’impression de replonger dans l’immédiat après-guerre, comme Izraël à Paris. Pourtant les Doudes en ont localisé une très fournie, à deux pas de l’église Santa Maria in Trastevere.

La Drogheria des frères Giovanni et Giancarlo Innocenzi est un fouillis sans nom… Mais les vendeurs, dans leurs blouses brunes d’une autre époque, sauront vous conseiller. En vrac (sans métaphore), on y trouve de multiples sortes de pâtes et de sauces qui vont avec, des céréales et des légumineuses (dont de très nombreux riz italiens), des douceurs transalpines (amaretti, canestrelli, petites couronnes au vin, confiseries, etc.), et une grande variété de spécialités locales venues de tous les coins de la péninsule.

Pour ceux qui aiment tartiner, la Drogheria Innocenzi a une incroyable sélection de miels (amandier, citronnier, lavande, etc.), des confitures artisanales originales (cédrat, bergamote, réglisse, piment, etc.) et surtout, surtout, la redoutable crème de noisettes Baratti & Milano, du café turinois fondé en 1858 (qui est au nutella ce que le béluga est aux œufs de lump… pas de mauvaises graisses ajoutées, juste des noisettes, du sucre, du cacao et du lait écrémé en poudre).

Vous y trouverez également de nombreux produits à base de truffes noires ou blanches : entières, en morceaux, en pâte, en huile parfumée, etc. Les alcools ne manquent pas à la Drogheria Innocenzi : un vaste choix d’eaux-de-vie de raisin (la grappa) ou d’autres plantes italiennes : figues, figues de Barbarie, etc.,

Fermé le dimanche et le jeudi après-midi (et le samedi après-midi l’été)

Piazza San Cosimato, 66 – 00153 Trastevere – Roma
+39 06 581 2725

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Rubrique : Rome

Rome est pleine de trattorie et il est difficile d’en élire une plutôt qu’une autre. Finalement, à nourriture similaire, elles ne se différencient que par l’affection qu’on leur porte, souvent pour des raisons éminemment subjectives. Pour les Doudes, LA trattoria romaine c’est La Botticella.

Depuis quelques années, le quartier du Trastevere (« trans Tiberim », l’Outre-Tibre) perd rapidement son esprit prolétaire pour devenir un quartier touristique et branché. Il est donc devenu plus difficile d’y trouver un restaurant populaire qui préserve l’esprit local. Dans une ruelle un peu à l’écart de la foule, parallèle et à l’ouest de la Via della Scala, La Botticella est une poche de résistance face aux mangeries qui envahissent le quartier.

Avec ses toiles cirées en vichy rouge et blanc, sa treille, sa décoration intérieure parfaitement kitsch (des soldats romains, des statues de dieux, des photos d’Anna Magnani et d’Alberto Sordi, de la peinture rose, etc.), la Botticella est la parfaite trattoria romaine, de celles qu’on éviterait partout ailleurs. Pourtant, là, on se sent bien. Grâce à la cuisine, grâce à l’adorable patronne et à son sbire, une sorte de Roy Orbison géant.

La Botticella sert les grandes spécialités de la cuisine romaine : les inévitables artichauts à la juive bien sûr (frits), mais aussi la tarte aux anchois et aux endives, les fleurs de courgette farcies d’anchois et de mozzarella, ou la soupe de brocolis et d’arzilla (la raie bouclée, Raja clavata). Bien sûr, les pâtes sont en bonne place : rigatoni alla pajata (aux intestins de veau non sevrés cuits avec le lait caillé encore à l’intérieur…) ou schiaffoni all’amatriciana (des sortes de cannelloni plats avec une sauce tomates-piments-pecorino romano).

De nombreux plats de viande sont à la carte : la porchetta (le cochon de lait farci et grillé), les saltimbocca alla romana (escalope de veau roulée avec des feuilles de sauge), les tripes à la romaine (avec des carottes, du céleri et des tomates), la coda alla vaccinara (queue de veau « à la bouchère », longuement mijotée avec des légumes), bref de quoi rendre heureux les carnivores de passage. En dessert, si vous avez encore de la place, essayez la torta romana à la ricotta et au chocolat.

À la belle saison, on peut manger dehors, sous les draps qui sèchent en travers de la ruelle. La Botticella, on y va et l’on y revient. Parce que c’est Rome, parce que c’est bon, parce que c’est comme dans les films… Marceeeellllo ! Marceeeellllo !

Environ 30 € par personne avec le vin.
Ouvert de 19h à minuit tous les jours sauf le mercredi, et pour déjeuner le dimanche et les jours fériés.

Vicolo del Leopardo, 39/A – 00153 Trastevere – Roma
+ 39 06 581 4738

www.ristorantelabotticella.com

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Rubrique : Italie

Si vous pensez que la restauration rapide italienne, c’est la foccacia ou la pizza, vous vous fourvoyez. Le fast-food transalpin, c’est le tramezzino, sandwich triangulaire des petites faims à toute heure. Une sorte de coussin triangulaire, moelleux, douillet, dont la confection relève d’une forme d’art populaire où l’esthétique joue un rôle important.

Les tramezzini sont une spécialité italienne récente puisque leur préparation exige du pain de mie très blanc et sans croûte, sans doute un apport anglo-américain. Leur « invention » aurait eu lieu à Turin dans les années 1920 (au Caffè Mulassano de la piazza Castello), mais cela relève probablement de la légende. En effet, les tramezzini semblent fortement inspirés des sandwiches britanniques servis lors du « High Tea ». Baptisés par l’écrivain Gabriele d’Annunzio (une autre légende ?), ils sont devenus populaires dans les années 1950, d’abord dans le nord de l’Italie puis dans le reste du pays. Néanmoins, Mestre/Venise et Turin se disputent toujours le titre de capitale du tramezzino…

Les tramezzini ne sont pas de simples carrés de pain de mie farcis et coupés en diagonale : le tramezzino, une fois tranché, doit montrer une section élégante, graphique, géométrique. Ceux qui les préparent posent les ingrédients de manière à ce que la coupe révèle des motifs réguliers. Spirales de charcuterie farcies de fromage frais, rayures d’épinards et de gorgonzola, chevrons de tomates, d’artichauts et de thon, etc. Le tramezzino se doit d’être beau avant d’être bon.

Les variétés se sont rapidement éloignées des classiques thon-œuf dur haché ou jambon-œuf. Dans la plupart des cas, les ingrédients sont liés par de la mayonnaise ou une sauce maison pour éviter que les tramezzini ne se défassent à la moindre manipulation. Aujourd’hui, on trouve toutes sortes de tramezzini : avec des tomates, des artichauts, de la mozzarella, de la porchetta (le cochon de lait désossé, farci et rôti), des crevettes, du crabe, des asperges et même un tramezzino à la viande de cheval séchée et à la roquette…

Si vous vous promenez en Italie, gardez l’œil ouvert pour admirer et goûter la production locale de tramezzini. Chaque région a ses spécificités et il est possible de faire un grand Tramezzini Tour de la péninsule. Récemment, une boutique en ligne de tramezzini a ouvert : elle dessert les villes de Turin, Milan, Rome, Monza et… Shanghai !!! À Paris, on trouve parfois des tramezzini chez les traiteurs italiens ou dans les restaurants-cafés (par exemple au Miroglio Caffè, 88 rue Saint-Martin, 75004).

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Rubrique : Rome

Avez-vous déjà vu une librairie transformée en restaurant ? Avez-vous déjà traversé des rayons de livres en jonglant avec une assiette pleine, des couverts, un verre de jus d’orange, une serviette… À Rome, au cœur du quartier du Trastevere, la librairie-centre-culturel-webcafé-restaurant Bibli permet tout cela et plus encore…

Bibli, c’est une institution romaine. Créée en 1995, cette structure culturelle est une sorte d’oasis dans le très touristique et bobo-ifié quartier du Trastevere, si cher à Pasolini. Bibli est d’abord une librairie de plusieurs salles organisées autour d’une courette. Elle se double d’un centre culturel où sont organisés des conférences, des rencontres, des lectures, des concerts, des projections de films, des activités pour les enfants, etc.

Bibli est également un centre d’accès au réseau (avec wifi gratuit) et un café-restaurant qui sert des déjeuners, du thé et des gâteaux dans l’après-midi, un apéritif-buffet à partir de 18h30 (avec ambiance de musique classique), un petit brunch le samedi et un grand brunch le dimanche.

Les Doudes ont essayé le brunch du dimanche et ce fut un moment surréaliste. Imaginez une librairie envahie de tables, avec des buffets croulants sous les salades, les légumes au four, les pâtes, les tartes salées, les pâtisseries, les pancakes, etc. Une foule bigarrée se croise en essayant (un peu vainement) de ne rien renverser sur les livres… Le personnel de Bibli se démène pour que les buffets soient toujours garnis et les clients satisfaits, contribuant à l’effet de fourmilière en folie.

Bibli, c’est un espace comme on rêve d’en avoir un dans son quartier. Ouvert sur le monde et sur les cultures, où la gourmandise est traitée sur le même pied que la curiosité intellectuelle. Si vous passez par Rome le temps d’un weekend, décrochez le téléphone, prenez votre plus bel accent italien pour réserver et allez vous offrir toutes les nourritures dont l’âme et le corps ont besoin. Après cet instant magique, les ruelles du Trastevere vous paraîtront encore plus belles.

Ouvert le lundi de 17h30 à minuit, les autres jours de 11h à minuit.
Brunch samedi et dimanche de 12h30 à 15h30 (réservation conseillée), 20 €.
Déjeuner les autres jours de 12h30 à 15h30, 10 €.
Apéritif avec buffet tous les jours de 18h30 à 21h30, 10 €.

Via dei Fienaroli, 28 – 00153 Trastevere, Roma.
+ 39 06 581 4534

www.bibli.it

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Rubrique : Paris

Rarement restaurant italien aura été l’objet d’autant de controverses qu’Amici miei… Les Parisiens semblent se diviser entre ceux qui en font LE temple de la pizza et ceux qui n’y voient qu’un restaurant bobo au service exécrable. Papilles en bandoulière, les Doudes sont parties enquêter.

amici miei #1 amici miei #2 amici miei #3 amici miei #4

Depuis des années, Amici miei est un restaurant dont le nom s’échange entre amateurs de pizza. Il est vrai qu’en matière de pizza sérieuse, l’offre parisienne est sérieusement limitée. Initialement situé dans une anfractuosité du boulevard Beaumarchais, il se trouve depuis quelques années rue Saint-Sabin, dans le XIe arrondissement.

Amici miei est un restaurant tenu par des Sardes, dont Veronica, la jeune chef. On y trouve donc toutes sortes de classiques de la Sardaigne : tripes à la menthe, fregola (pour faire court, des pâtes en forme de petits pois), curlugioni (raviolis sardes), etc. La carte propose également de nombreux plats à base de produits de la mer.

Côté pizza, une mention spéciale pour le choix de pizze blanches (sans sauce tomate), plutôt rares à Paris : par exemple, une pizza blanche avec du basilic, de la poutargue (des œufs de poisson mulet salés et séchés) et des tomates séchées.

Alors, Amici miei, paradis ou enfer ? Disons que, côté accueil, c’est… spécial. On ne réserve pas, mieux vaut venir tôt sinon c’est ouste ! Sauf si vous êtes Italien bien sûr… Côté service, comme dans de trop nombreux restaurants transalpins parisiens, il suffit de commander en italien pour que le service soit au top. Si, de plus, vous êtes capable d’aller en cuisine commander, en sarde, ce qu’il a de meilleur aujourd’hui, Amici miei devrait devenir votre cantine adorée ! Pour les autres…

Côté qualité des produits, pas grand-chose à dire : la pizza est à la hauteur, les fregola aux palourdes délicieuses, le ragoût de poissons très frais, les desserts réussis… Une cuisine pas forcément très fine, mais qui a dit que la cuisine sarde l’était ? L’addition non plus n’est pas très fine : compter 40 € par personne avec le vin.

Fermé dimanche et lundi.

44 rue Saint-Sabin – 75011 Paris
+ 33 1 42 71 82 62
www.amici-miei.net

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