Rubrique : Desserts & sucreries

L’Italie n’est pas le seul pays célèbre pour ses glaces. Avec le salepi dondurma, un dessert ottoman glacé à base de poudre de tubercules d’orchidées, la Turquie se positionne très haut dans le panthéon des amateurs de glace.

salepi

Si vous partez en vacances d’été en Turquie, il y a de fortes chances que vous tombiez sur un marchand de glaces proposant de la glace à l’orchidée, le salepi dondurma. Cette glace possède des propriétés physiques étonnantes : elle est à la fois très ferme et très élastique. Elle peut prendre la forme de rubans épais qui s’étirent sans se briser. La légende veut que l’on puisse s’en servir comme d’une corde à sauter… Depuis trois siècles, les glaciers la travaillent et la servent avec de longues barres de métal.

Les deux ingrédients essentiels du salepi dondurma sont la poudre de tubercules d’orchidées (ou salepi, mot venant d’une expression arabe signifiant « testicule de renard », dont la richesse en mucilages est à l’origine des propriétés physiques particulières de cette glace) et la résine de lentisque (ou mastic, qui lui donne son goût légèrement résiné). L’exportation de salepi pur de Turquie étant désormais interdite, on peut le remplacer par les poudres destinées à préparer le sahlep (dans toutes les épiceries orientales).

  • 400 ml de crème fleurette
  • 400 ml de lait entier
  • 110 g de sucre en poudre
  • 50 g de préparation à sahlep/sahlab
  • ½ cuillerée à café de mastic broyé

Placez le mastic une demi-heure au congélateur, puis broyez-le dans un mortier avec une grosse cuillerée à soupe de sucre en poudre.

Dans un bol mixeur ou un saladier, fouettez le mélange mastic-sucre avec 100 ml de lait jusqu’à dissolution complète. Dans un autre bol, faites dissoudre la préparation à sahlep dans 100 ml de lait en mélangeant bien (ça prend facilement en masse). Chauffez doucement les 200 ml de lait restant et ajoutez-les au mélange mastic-sucre en fouettant énergiquement (le bol mixeur s’avère précieux). Sans cesser de fouetter, ajoutez le mélange sahlep-lait, puis le reste du sucre et la crème fleurette. Lorsque le mélange est bien homogène, mettez-le dans une casserole et faites-le bouillir 20 minutes à feu réduit sans cesser de fouetter vivement (sinon c’est le goût de brûlé assuré). Laissez refroidir le mélange en fouettant de temps en temps et placez-le quelques heures au réfrigérateur avant de le mettre dans une sorbetière.

Si vous n’avez pas de sorbetière, placez le mélange dans un plat métallique, couvrez de manière hermétique et mettez au congélateur. Toutes les demi-heures, sortez le mélange et battez-le avec un mixer électrique ou (en avant les biceps !) avec un fouet ou une fourchette jusqu’à ce qu’il soit onctueux. Remettez une demi-heure au congélateur. Répétez l’opération au moins trois fois (en général c’est plutôt cinq fois !).

Consommez le salepi dondurma rapidement avant que le goût du mastic et celui du salepi ne se mélangent trop.

NB 1 : Une glace composée des mêmes ingrédients existe en Grèce sous le nom de pagoto kaimaki. Elle est généralement d’une consistance plus crémeuse que le salepi dondurma qui, lui, peut se mâcher…

NB 2 : Si vous arrivez à mettre la main sur de la poudre de salepi pure (on en trouve d’origine libanaise sur internet), remplacez le mélange à sahlep par deux cuillerées à café rases de salepi. Attention, la poudre de salepi fait prendre en masse tous les liquides qui croisent son chemin… Assurez-vous d’avoir un bol mixeur costaud ou des biceps de culturiste.

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Rubrique : Épices, condiments & herbes

Le mastic, ou gomme de lentisque, est la résine séchée d’un arbuste méditerranéen, le pistachier lentisque (Pistacia lentiscus). Très parfumé, il entre dans la préparation de nombreuses recettes, de la Grèce au Maroc.

mastic

Le mastic (ou mastiha) est une gomme au parfum très particulier qui est utilisée depuis l’Antiquité comme ingrédient alimentaire et gomme à mâcher. Elle a également longtemps été utilisée en médecine comme antiseptique, antiulcéreux, etc. Il ne faut pas confondre le mastic et la gomme arabique. Cette dernière, récoltée sur des acacias, n’est pas parfumée et sert essentiellement d’épaississant alimentaire.

Le mastic est produit en incisant l’écorce des pistachiers lentisques en été et en laissant la résine s’écouler. Les gouttes de mastic séché sont ensuite récoltées au pied des arbres. Chaque année, un arbre produit en moyenne de 4 à 5 kg de « larmes de Chios », du nom de l’île grecque où la majorité du mastic est produit depuis des siècles. En 1822, Chios a connu d’autres larmes : accusés d’avoir participé à la guerre d’indépendance de la Grèce, ses habitants ont été massacrés par les troupes ottomanes.

Le mastic est utilisé dans de nombreuses recettes grecques, turques, moyen-orientales et nord-africaines : par exemple, dans des plats de viande comme le nirbach ottoman, ou dans des glaces comme le paigoto kaimaki grec ou le salepi dondurma turc. Outre son parfum résineux, il y apporte ses propriétés épaississantes. En Turquie, on trouve du sakız (le nom turc du mastic, prononcez « sakeuz ») dans de très nombreux desserts : muhallebi, cheesecake et même une sorte de confiture de mastic (en fait une pâte sucrée parfumée au sakız). Dans les chewing-gums, le sakız y est aussi populaire que la menthe.

Le mastic s’utilise broyé dans un mortier avec un peu de sucre pour éviter qu’il ne devienne collant. Cela marche encore mieux s’il est préalablement resté une demi-heure au congélateur !

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Rubrique : Boissons

Que ce soit en Turquie ou au Liban, l’hiver est officiellement là lorsque les vitrines des salons de thé affichent un écriteau indiquant « Sa(h)lep » (en Turquie) ou « سحلب » (sahlab, dans les pays arabophones). Cette boisson chaude à base de poudre de tubercules d’orchidées est censée aider à lutter contre les petits maux de la saison froide.

salep

L’histoire du salep remonte à l’Antiquité. La forme des tubercules d’orchidées européennes, très évocatrice de testicules, était interprétée comme preuve de leur effet aphrodisiaque. Les Romains préparaient une boisson à base de poudre de tubercules d’orchidées, appelée… « satyrion » ! Le salep est probablement le descendant direct de cette coutume romaine. Sahlab, le mot arabe, vient de l’expression signifiant « testicules de renard ».

Au XVIIe et XVIIIe siècles, le salep était très populaire en Angleterre sous le nom de « saloop » et il y était apprécié pour sa richesse énergétique. L’arrivée du café le fera tomber dans l’oubli. Aujourd’hui, le salep est toujours très populaire au Moyen-Orient. Il est préparé à partir de lait, de sucre et de poudre de tubercules d’orchidées (plusieurs espèces sont utilisées). Dans les salons de thé, ce mélange est maintenu chaud et brassé en permanence dans des machines spéciales.

Le salep est un liquide épais qui cale bien l’estomac… En effet, la poudre de tubercules est très riche en mucilages (une substance très nutritive qui forme une sorte de gel lorsqu’elle est diluée). D’un goût assez neutre, le salep est parfois parfumé avec de l’eau de rose ou de l’eau de fleur d’oranger. Il est servi saupoudré de cannelle.

Les tubercules d’orchidée sont récoltés dans les montagnes d’Anatolie, brièvement blanchis et mis à sécher. Ils sont ensuite broyés pour obtenir une poudre, le salepi, qui sert à la fabrication du salep mais aussi du salepi dondurma, la glace turque typique de la ville de Maras.

La poudre de tubercules a longtemps été utilisée par les médecins comme émollient (pour apaiser les inflammations), ainsi que pour préparer des boissons fortifiantes pour les convalescents ou les enfants. Elle était également emportée sur les bateaux à voile pour servir de nourriture de secours en cas de problème (une dose de 50 g était considérée comme suffisante pour nourrir un homme toute une journée !).

La poudre de tubercules pure est difficile à trouver en Europe. Les orchidées étant menacées de disparition, le gouvernement turc en a interdit l’exportation. Par contre, il est facile de trouver le mélange pour faire du salep/sahlab dans la plupart des épiceries moyen-orientales. Il suffit de rajouter du lait et de faire chauffer le tout en fouettant sans discontinuer sous peine de devoir sérieusement récurer la casserole…

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